Stéphane Malchow, directeur de la Brasserie Mollard à Paris Saint-Lazare, se livre sur son parcours et ses ambitions pour l’une des brasseries les plus emblématiques de la capitale dans une interview avec Yanis Bargoin pour Exquis Mag. Diplômé en commerce international, Stéphane a d’abord entamé sa carrière dans la grande distribution avant de revenir à ses racines familiales.
Après une période difficile sur le plan de la santé, il trouve sa vocation aux côtés de son grand-père, en intégrant l’école hôtelière de Paris puis en s’immergeant dans des expériences de prestige aux États-Unis et au sein de grandes brasseries parisiennes. Aujourd’hui, il dirige avec passion la Brasserie Mollard, où il met un point d’honneur à maintenir une ambiance familiale et une équipe soudée, dans le respect de la tradition. Voici son parcours et ses aspirations pour l’avenir de cette institution.
Yanis Bargoin : Stéphane Malchow, comment avez-vous débuté dans le domaine de la restauration ?
Stéphane Malchow : Au départ, j’étais dans le commerce, avec un BTS de commerce international et une première expérience dans la grande distribution chez Auchan. Mais après avoir traversé une période de maladie, j’ai décidé de rejoindre mon grand-père, qui dirigeait la Brasserie Mollard. J’ai ensuite suivi une formation à l’école hôtelière de Paris en gestion et management, et j’ai passé un an aux États-Unis pour parfaire mon anglais et me spécialiser dans l’hospitality. J’ai également travaillé dans plusieurs établissements prestigieux avant de revenir chez Mollard pour reprendre le flambeau familial.
Quelle est la philosophie culinaire de la Brasserie Mollard ?
S.M. : Nous avons une carte équilibrée qui respecte les valeurs classiques de la brasserie française avec des classiques comme l’omelette norvégienne qui est resté inchangé depuis le début.
Notre chef, très attaché à la tradition, modernise toutefois ses sauces en y intégrant des ingrédients comme les amandes ou des épices douces. Nos classiques – beurre blanc, béarnaise, crème de morilles – restent inchangés, mais nous nous adaptons aussi aux tendances, notamment pour les clients végétariens et pour respecter la saisonnalité des produits. Par exemple, nous servons la sole uniquement quelques mois par an, pour ne pas perturber les stocks naturels.
Comment parvenez-vous à rester indépendant dans un monde de plus en plus dominé par les chaînes ?
S.M. : L’indépendance est un choix et une valeur fondamentale pour nous. Nous avons été approchés par des grands groupes à plusieurs reprises, mais nous avons toujours décliné pour rester fidèles à l’esprit familial de la maison. Être maître restaurateur, titre délivré par l’État, nous engage à une cuisine 100 % maison, avec des produits frais. Nous tenons à offrir à nos clients une expérience authentique, sans compromis.
Avez-vous des objectifs de rachat ?
Je n’ai pas l’intention de gérer plusieurs restaurants, car c’est un métier différent. Ici, je connais mes 45 salariés par leur prénom, je connais chaque détail de la maison, du sous-sol jusqu’au dernier étage. Mes employés, je les connais bien, je les apprécie, et ce sont eux qui font le succès de cette maison. Chez nous, les équipes restent jusqu’à la retraite. Pour certains, quand l’âge arrive, je leur propose des arrangements, comme de passer à un quatre-cinquième temps pour qu’ils continuent, car ils sont tellement bien ici. Cette stabilité crée un lien fort avec notre clientèle. Par exemple, quand des clients demandent à être servis par un serveur en particulier, c’est important pour eux de retrouver des visages familiers.
Le métier a beaucoup évolué. Aujourd’hui, il faut compter six à huit mois pour trouver la bonne personne, contre seulement quelques semaines dans les années 90. Cela rend le management, le respect des horaires, des jours de repos, et le bien-être au travail encore plus cruciaux. Pour moi, les équipes sont aussi importantes que les clients. »
Reprise générationnelle ?
J’ai trois filles, de 26 ans, 24 ans, et 3 ans, et aussi deux neveux qui ont fait une école hôtelière. Pour moi, transmettre une entreprise est complexe. Vous pouvez hériter d’une maison ou d’un appartement sans grande conséquence si vous ne vous en occupez pas, mais une entreprise, c’est différent : elle a besoin de travail, de passion et d’engagement.
On ne peut transmettre qu’à quelqu’un qui est prêt et désireux de prendre le flambeau. Mes filles n’ont pas encore cette volonté affichée, et mon plus jeune enfant est encore trop jeune. Mais un de mes neveux est intéressé et volontaire, et j’espère qu’il sera capable de faire perdurer cette histoire familiale, car il ne faut jamais oublier d’où l’on vient.
Brasserie Mollard
115 Rue Saint-Lazare, 75008 Paris
mollard.fr